Yalthia scrutait la pénombre.
L’éclat serein des étoiles perçait à travers les feuillages épars de la canopée. Les cieux charbonneux se criblaient de mystérieux points colorés et cryptiques ; le colosse n’arrivait plus s’orienter. Son père lui avait pourtant tout appris. Il se souvenait de l’astrolabe conservé dans l’un des tiroirs de sa malle. Le vieil homme s’y référait souvent lors de leur voyage. Il lui racontait que le soleil tombe toujours à l’est, que la trame céleste glisse au rythme des saisons, que les lueurs changeantes apportent leurs précieux conseils à ceux qui savent les déchiffrer. Yalthia en connaissait les lignes. Il les avait tracées du doigt dans les sables brûlants jusque dans les neiges éternelles – partout où son père l’avait entraîné -, mais en ce jour, il n’en distinguait plus les canevas.
Alors, à défaut de comprendre, il avait choisi un point rouge parmi les astres bleutés, un point posé sur l’horizon aquatique. Il l’avait gardé bien en vue entre les arbres qui longeaient la clairière. Sur son chemin, tout lui parut étranger. L’atmosphère pesait sur une végétation de fougères et de buissons touffus. Elle se chargeait de mystérieuses odeurs et d’ululations distordues qui abondaient depuis les hauteurs. D’invisibles spectateurs attendaient l’instant parfait pour fondre sur cette proie nouvelle, ce morceau de choix qui errait aux abords de leur territoire. Yalthia n’y pensait pas. Il n’éprouvait pas la peur. Seule sa propre faim l’obsédait. Elle guidait ses pas. Il savait qu’il trouverait de quoi la museler au cœur de cette forêt. Chasse ou cueillette, ça n’avait pas d’importance.